J’entends souvent des élèves (en général plutôt des novices) dire pendant les exercices «Ca marche pas» «. Et souvent je constate que «cela ne marche effectivement pas» parce qu’un principe fondamental de l’exercice en question a été mal appliqué ou carrément oublié, et non pas par manque d’aptitude du pratiquant. Chaque technique, chaque mouvement, chaque stratégie, est prévu, pensé, optimisé pour être performant dans un domaine reposant sur des critères spécifiques et limité par des conditions particulières. Prenons quelques exemples concrets. – En self-défense, une technique visant les yeux, ou le nez, paraît extrêmement facile à réaliser, avec très peu, voire pas d’entraînement. Toutefois, susceptible de causer immédiatement de graves blessures, elle est considérée comme efficace. Mais elle n’est envisageable que si l’agresseur ne porte pas un casque de moto (situation qui n’a pourtant rien d’utopique). – Il en va de même pour les coups de pieds dans les tibias ou les genoux, et dans les parties génitales. Relative facilité d’apprentissage, fort potentiel défensif, … ô miracle, quand on sait faire ça, plus besoin de gardes du corps. Essayez donc d’intimider les genoux de votre agresseur, lorsque vous êtes assis au volant de votre voiture, avec la portière fermée et la fenêtre ouverte. Naturellement, il en va de même pour tout. Un bateau, qu’il soit à rames, à voiles ou à moteur, n’est guère utile pour vous transporter sur la terre ferme. Une voiture de sport, de luxe, ou même tout-terrain n’est sans doute pas capable de flotter plus de quelques minutes, même déposée délicatement, au milieu d’un océan pourtant aimablement calme. Un langage n’est utilisable qu’avec d’autres personnes qui le comprennent, etc. Pourtant tout «cela marche parfaitement bien». Oui, mais uniquement dans le contexte prévu pour chaque application. Les exercices proposés dans l’apprentissage du Karaté-Do ne dérogent pas à la règle. Chercher l’efficacité d’une technique hors de son contexte, revient à changer les conditions, donc à rendre inefficace le mouvement. A ce moment il est facile de conclure à tort que cet exercice, ou pire, que «le Karaté-Do ne marche pas». Il suffit parfois de très peu de chose, pour rendre caduque une situation. Asseyez vous à table avec votre meilleur couteau, et on vous sert un bol de soupe. Allez vous vraiment penser que le couteau ne coupe pas bien ? Essayer de démarrer votre voiture avec la clé de la boîte aux lettres. C’est contre le fabriquant de boîtes aux lettres, contre celui de la voiture, contre celui de la clé ou contre l’inventeur des serrures que vous allez intenter un procès ? Revenons brièvement au fait que ce sont plus souvent les élèves débutants qui butent sur ce genre de dérive. Les avancés au contraire ont fréquemment tendance à inverser leur point de vue, ce qui les amènes, eux, à croire également à grand tort, que leurs techniques sont plausibles en tout temps et dans toute situation. C’est évidemment une aberration dangereuse pour la progression de tout Karatéka. Pour conclure, la prochaine fois que vous trouvez qu’un exercice « ne marche pas», demandez vous si votre Coca chaud et sans bulles n’est pas plutôt du café. Alain

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